Têtes fêlées

Publié le par P. Kabengele

L' édifice est lézardé

Un détail, une anecdote valent souvent plus que de longs discours, des argumentations et démonstrations savantes. Nos dirigeants sont-ils capables ? La légitimité obtenue par les urnes ne suffit pas pour gouverner et surtout reconstruire le Pays. Une sorte de chaos s' installe. Le journal proche du pouvoir, La Tempête des Tropiques, annonce que Joseph Kabila consulte pour la formation d' un nouveau gouvernement Gizenga-bis, comme si on était encore sous le régime présidentiel. La crise constitutionnelle est évidente avec des cellules qui refusent d' appliquer les textes institutionnels. La même confusion règne dans l' affairisme politique et la multiplication des accords par lesquels on donne des richesses minérales en échange de la construction des infrastructures. A ce rythme, les caisses de l' Etat se vident en investissements et les fonctionnaires, par exemple, seront rémunérés bouts de bitume chinois.
 
On apprend ainsi que la China national Machenery and Equipement corporation ( Cmec) va relancer la Miba, construire des infrastructures et  bénéficier, en échange, les gisements de nickel et de chrome à Nkonko et Lutshiatshia dans le Kassaï occidental. L' Afrique du Sud va construire des infrastructures routières dans la province du Katanga, notamment une autoroute Kasumbalesa-Lubumbashi et l’axe Likasi-Kolwezi. Pourtant, ces mêmes travaux katangais viennent d' être promis par la Chine en échange de mines de la province. C'est à juste titre que les observateurs se demandaient ce que les Sud Africains avaient réclamé en échange des travaux routiers. Ils ont appris que, aussitôt, le gouverneur du Katanga s' emploie à remettre la mine de l' Etoile actuellement indienne à une société sud africaine.
 
C' est dans cette confusion que circule une interview brillante, mais rocambolesque attribuée à Joseph Kabila.  Il aurait conclu: « J’entends faire de mon pays la RDC, la première puissance économique, militaire et nucléaire de l’Afrique noire. La Chine va nous aider dans ce sens, n’en déplaise à certains »?. Jamais un chef de l’ Etat quelconque n’ aurait tenu de tels propos, surtout pas à New York et en marge d’ un débat général de l’ assemblée annuelle des Nations Unies où l’ on se préoccupait du programme nucléaire iranien. De plus, l' interviewer Jackson Wilson qui se prétend journaliste indépendant à Washington DC sort du néant. On ne lui trouve aucun antécédent professionnel. S' il faut avouer que le style de Jackson est brillant, il fera sans doute un excellent écrivain, mais de fiction politique.

Mais voilà que le journal UHURU publie le pseudo interview  http://www.digitalcongo.net/article/47110#  en vantant les positions dites courageuses du président congolais. « L’évaluation que Joseph Kabila fait de la coopération bilatérale avec les pays occidentaux et particulièrement avec la Belgique est loin d’être satisfaisante, et il en tire les conséquences. Il n’a pas peur de finir comme son défunt père qui a arpenté les mêmes sentiers du nationalisme et assume ses dires. Le dessein qu’il nourrit pour son pays est à la mesure de ses ambitions lesquelles s’inscrivent dans la durée, avec comme finalité, faire du Congo la première puis­sance économique, militaire et nucléaire de l’Afrique noire. » Le journal Uhuru est du giron de la coalition gouvernementale AMP. Mieux, Uhuru a été repris par le site digitalcongo qui appartient à Jaynet Kabila, la sœur du chef de l’ Etat. Ceci vaut plus qu' un aval.

Qui va arrêter la bêtise ? Le journal l’ Avenir qui appartient à la même mouvance présidentielle réagit avec un communiqué officiel selon lequel « à part son discours à la tribune de l’Onu, le président Kabila n’a accordé aucune interview à aucun journal ni à aucun journaliste étranger. » http://www.groupelavenir.net/spip.php?article14233  Le journal parle de complot. Mais c'est trop tard. Le fait-même que des proches du pouvoir ont cru à des propos insensés de Kabila, signifie qu' ils donnent du sens à tout ce qu' on lui prête. Il n' y a pas de doctrine politique. On fait du n' importe quoi. L' édifice est lézardé. D' en haut.
 
Pio Kabengele

Publié dans congo

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